Vieille origine de la famille. — Le comte de Genestet devient marquis de Nérestang. — Il élit domicile à Aurec. — Louis XV. — Guerres et faillite. — Surexcitation des esprits. — Influence de Rousseau, Voltaire, Montesquieu et des Encyclopédistes.
C’est une famille originaire du Velay et du Languedoc et qui s’est répandue également dans le Bourbonnais.
Pendant le séjour de Charles VII, alors Dauphin, au château d’Espaly, près du Puy, un membre de la famille Genestet, dont ce prince avait apprécié les services, devint son ami.
Monté sur le trône, le souverain n’oublia pas son fidèle serviteur et lui fit présent d’une médaille d’or, dont une face reproduisait les traits du monarque, et dont l’autre portait en exergue : Carolus VII Nobili Viro Genestet, an 1425. Ceci prouverait que la noblesse de cette maison est antérieure à l’année 1425.
En effet, nous trouvons Bernard de Genestet, clerc du roi, dans une charte originale passée à Limoges, en 1277. Cette famille possédait les seigneuries de Seneujols, de Montbonnet, de Planhol, d’Entremont. Elle a fourni plusieurs officiers supérieurs, un prévôt de l’église cathédrale du Puy, des magistrats distingués.
Les armoiries étaient d’azur à un coeur ailé d’or.
Au XVIIe siècle, la famille se divisa en trois branches :
1° celle de Taillas, éteinte depuis longtemps ;
2° celle des barons de Saint-Didier, encore représentée actuellement, semble-t-il ;
3° celle de Planhol, également existante.
Tout au moins, suppose-t-on que ces deux dernières familles ont encore des descendants ?
Le comte Christophe de Genestet de Planhol laissa, de son mariage avec Cahade d’Angerolles, quatre fils.
Les armoiries de cette maison étaient : d’azur au coeur ailé d’or Couronne de marquis. Supports : deux lévriers.
Avant de mourir, le 7 février 1733, le marquis Louis-Achille de Nérestang, baron de Saint-Didier, duc de Gadagne, avait légué tous ses biens à sa tante, la marquise de Chatillon.
Cette dernière ne les conserva pas longtemps, exactement trois mois, puisque, le 3 mai 1733, elle vendit la baronnie de Saint-Didier à Jacques de Genestet, seigneur de Seneujols et de Montbonnet. Il devint donc marquis de Nérestang, chevalier, seigneur et vicomte de Saint-Didier, Aurec, Oriol, Saint-Ferréol, Saint-Victor-Malescours et autres lieux.
Jacques de Genestet, également seigneur de Mirmande et de Grataloup fut juge-mage de 1714 à 1753 et secrétaire du roi, maison et couronne de France.
Il était le fils de Claude-Dominique de Genestet de Seneujols et de Marguerite de Jacquet, morts, l’un et l’autre, avant 1715. Il se maria, le 24 août 1715, dans la chapelle du château de Maubourg, avec Marguerite de Fay de la Tour-Maubourg, fille de Jacques de Fay, comte de la Tour-Maubourg et d’Eléonore Palatine de Dio-Montperroux, dont le père fut maréchal de France.
De ce mariage, naquirent :
I. Jean-Hector, mort en bas âge ;
II. Jean-Philibert, mort à 13 ans ;
III. Claude-Jacques-Vincent, en 1719 :
IV. Hugues, mort à 7 ans ;
V. Jean-Marie-Hector-Philibert, seigneur de Mirmande, qui, tonsuré, obtint à Rome, en 1737, le prieuré d’Aurec, et mourut à 17 ans, le 6 octobre 1739. Il est inhumé dans le caveau des prieurs, à l’église d’Aurec.
VI. Jean-André-Philibert, seigneur d’Auteyrac, puis chevalier de Seneujols, né en 1725, mort sans alliance à Aurec, le 29 octobre 1758.
VII. Polixène, morte en bas âge.
Dès qu’il eut acquis la baronnie de Saint-Didier, le marquis Jacques de Genestet vint habiter le château d’Aurec.
En 1736, il assista, ainsi que son épouse, au mariage de Marie-Marguerite-Eléonore de Fay de la Tour-Maubourg, sa nièce, avec le comte de Gerlandes.
Le marquis de Genestet, baron de Saint-Didier, était attentif à la bonne administration de ses domaines. Il encourageait les transactions. Parmi les nombreuses reconnaissances qui sont parvenues jusqu’à nous, citons un acte du 17 mars 1737 par Louis Coste à Jean Saignard d’un jardin, près de la tour des Fours. Une reconnaissance du 23 mai 1737 par Jean Chouia à Jean Armand de Saignard d’une maison et d’un jardin situés entre la porte de la Séauve et de la tour de Milon . Une reconnaissance du 14 juin 1737, par Catherine Monet à Jean Armand de Saignard, d’une maison et petite basse-cour situées au faubourg de la Séauve, près de la porte. Une reconnaissance, en 1746, par Gabriel de Ravel à Jean-Armand de Saignard, écuyer de Lafressange, d’un jardin près de la tour de Poyvre.
Le 3 août 1754, le marquis de Genestet prêta l’hommage pour ses biens situés dans le Forez.
Nous avons trouvé dans un rôle, les tailles de la ville de Saint-Didier, en 1732.
Ces tailles s’élevaient à 8.935 livres 3 sols 9 deniers, se répartissant ainsi : pour la ville, le château et les faubourgs, 4.282 livres, 4 sols, 2 deniers ; pour la campagne, 4.652 livres, 9 sols, 7 deniers.
La marquise de Genestet mourut à Aurec, le 15 novembre 1751, âgée de 56 ans.
Elle est inhumée dans la chapelle.
Le marquis de Genestet de Seneujols, baron de Saint-Didier, mourut d’apoplexie, en sortant de la messe, le dimanche 22 décembre 1754, âgé de 67 ans.
Il fut également inhumé à Aurec.
Nous avons dit que Louis XV (1715-1774), arrière-petit-fils de Louis XIV, était le seul fils survivant du duc de Bourgogne. Il n’avait que 5 ans, en 1715. Par testament, Louis XIV avait donné la régence à son neveu, le duc Philippe d’Orléans, mais en limitant son autorité par un conseil de régence.
Le duc d’Orléans fit casser le testament par le Parlement.
Le régent était intelligent mais dépravé. Ce régime fut une période honteuse de notre histoire.
La situation financière était désastreuse. On pratiqua une politique à la petite semaine, alors qu’il eût fallu une politique financière à longue échéance.
John Law, fils d’un orfèvre d’Edimbourg, proposa un système basé sur le papier monnaie. Le papier peu coûteux, disait-il, est plus propre à devenir monnaie que l’or très rare ou l’argent trop lourd.
Il créa des Banques et des Compagnies, dont les actions atteignirent très vite des prix exorbitants. Puis, ce fut la décadence et la chute. L’Etat fit banqueroute. Le système sombra donc dans la faillite, en 1720. Malgré tout, Law avait révélé la puissance du crédit.
Puis, voici encore les guerres.
Philippe V, roi d’Espagne, maintenait, malgré les traités d’Utrecht et de Rastadt, ses droits à la couronne de France.
La France s’allia avec l’Angleterre et la Hollande (triple alliance de La Haye, 1717). Le 11 août 1718, l’amiral anglais Byng détruisait une flotte espagnole en vue de Syracuse.
Après la découverte du complot de Cellamare, le Régent et l’abbé Dubois envoyèrent une armée contre Philippe V, petit-fils de Louis XIV. En avril 1718, le maréchal Berwick s’emparait de Fontarabie et de Saint-Sébastien et, en 1720, par le traité de Madrid, l’Espagne abandonnait des territoires et adhérait même à la Triple Alliance.
Le roi devint majeur en février 1723 et il épousa Marie Leczinska, fille de l’ancien roi de Pologne.
En 1733, la succession de Pologne se posa à la mort de Frédéric-Auguste II, électeur de Saxe. La guerre devint européenne et se termina par le traité de Vienne, en 1738, dans l’ensemble favorable à la France. En échange de son trône de Pologne. Stanislas Leczinski recevait les duchés de Lorraine et de Bar qui devaient faire, à sa mort retour à la France.
En 1740, la succession de la maison d’Autriche entraîna une nouvelle guerre. Frédéric II, roi de Prusse, envahit la Silésie et battit les Autrichiens, à Molwitz, le 10 avril 1741.
Quatre compétiteurs se disputent l’héritage, le duc de Bavière, soutenu par la France ; le roi de Pologne, le roi de Prusse, le roi d’Espagne.
La France se trouva donc aux prises avec une coalition formidable. La campagne des Pays-Bas fut marquée par la victoire de Maurice de Saxe, à Fontenoy, le 11 mai 1745.
La paix fut signée à Aix-la-Chapelle, le 18 octobre 1748. La France n’obtint rien. Le peuple se prononça contre une paix désastreuse. Bête comme la paix », disait-il.
On assista à un curieux renversement des alliances. Le 16 janvier 1756, l’Angleterre et la Prusse signèrent un traité d’alliance à Westminster. De leur côté, la France et l’Autriche se rapprochèrent et se garantirent leurs possessions en Europe.
Inévitablement, la guerre devait éclater.
Elle dura sept ans, de 1756 à 1763, et se divisa en trois périodes. Le traité d’Hubertsbourg, en 1763, mettait fin à la guerre continentale et ne changeait rien à l’état territorial de l’Europe. Toutefois, Frédéric II conservait la Silésie. Mais sur mer, la France fut battue par l’Angleterre. Et le traité de Paris, en 1763, consomma la perte de nos colonies d’Amérique et d’Asie. En 1768, la Corse devint française, tout juste un an avant la naissance de Napoléon Bonaparte, à Ajaccio. Rien n’empêcha, en 1773, la Prusse, la Russie et l’Autriche de se partager la Pologne.
Le 10 mai 1774, Louis XV, mourut, après un règne de cinquante-neuf ans.
Ses guerres maladroites et presque toujours malheureuses ont épuisé le pays. Les scandales de sa vie privée ont discrédité la royauté. Il a, on peut bien le dire, après son grand-père, ruiné la monarchie. Tous les esprits sont surexcités et demandent des réformes.
Les écrivains les plus populaires et les plus aimés, parce que les plus lus, Montesquieu, Voltaire, Jean-Jacques Rousseau, éclairent le peuple sur ses droits, sur sa force.
La royauté a laissé subsister plusieurs abus féodaux : inégalité dans les charges publiques, dans les lois, dans les droits ; privilèges de la naissance, intolérance religieuse, arbitraire dans le gouvernement.
Ces injustices sont passionnément combattues par les philosophes du XVIIIe siècle.
Voltaire se fait le défenseur de la liberté et de la tolérance (Procès de Calas, de Sirven).
Jean-Jacques Rousseau attaque violemment l’ordre social. Il se fait le défenseur de l’égalité et pose le principe de l’égalité de tous.
Montesquieu, auteur de l’Esprit des Lois, expose de remarquables idées sur la législation et la barbarie des lois pénales, et sur la liberté politique.
La publication de l’Encyclopédie, gigantesque entreprise dirigée par Diderot et d’Alembert, devient l’arsenal où puiseront tous les défenseurs des idées nouvelles qui ont reçu, en 1716, une première satisfaction par l’expulsion des Jésuites.
Les économistes s’occupent des intérêts directs et du bienêtre du peuple. Ils demandent une répartition plus juste des impôts. Ils recherchent les causes de la production de la richesse.
Quesnay, médecin de Louis XV, place la richesse exclusivement dans la terre et ne veut d’autre impôt que l’impôt foncier. Des physiocrates de l’école de Quesnay enseignent que le travail étant la source de toute richesse, tout homme, propre au travail, doit, par conséquent, être imposé.
Un peu partout, en Europe, des idées nouvelles s’agitent.
Dès lors, il était normal que les sciences physiques et naturelles connussent un grand développement. Citons Franklin, Volta, Réaumur, Montgolfier, Lavoisier, Laurent de Jussieu, Buffon, Lagrange, Laplace, Monge, etc.
La monarchie, conservatrice, autoritaire et bornée, était donc frappée à mort.
Quel fut le rôle des barons de Saint-Didier au cours de ces périodes ? Nous l’ignorons. Mais nous présumons qu’ils furent toujours du côté de la monarchie absolue, gardienne vigilante, attentive et intéressée de leurs privilèges.
Extrait de l’ouvrage, « D’Azur au Lion d’Argent » Tome II.
Paul Ronin