Le marquis Philibert de Nérestang (1600, 30 aout 1620)

Famille originaire de l’Auvergne. — Philibert servit utilement quatre rois. — En 1589, le roi érigea Autremomt en fief. — En 1591, il fut capturé à Givors par les Dauphinois du parti protestant. — En 1600, il fut à la tête d’un régiment de gens de pied. — En 1604, il arrêta à Clermont, d’ordre du roi, le comte d’Auvergne, accusé de trahison. — Le 7 septembre 1604, il fut nommé Grand Maître de l’ordre de Saint-Lazare, et, le 4 avril 1608, Grand Maitre de l’ordre du Mont Carmel. — Philibert de Nérestang commence l’acquisition de la baronnie de Saint-Didier vers 1599. — Le 20 juillet 1619, le roi transforma en marquisat la baronnie de Saint-Didier. — En 1618, Philibert fonda le monastère des Carmes déchaussés, à Lyon. — Sa fille, Françoise, abbesse de Mégemont et de La Bénissons-Dieu, tandis que son fils Claude fut abbé de L’Ille Barbe. — Le marquis entre en conflit avec les moines du couvent. — Une liaison illégitime du marquis. — Causes de dissentiment dans la famille. — Avènement de Louis XIV en 1610. — Régence de Marie de Médicis. — Révolte des nobles. — Le marquis de Nérestang mortellement blessé au combat de Pont-de-Cée, le 7 août 1620. — Le 20 août, il fit son testament et il mourut le 30 août 1620. — De Nérestang fut inhumé au couvent des Carmes, à Lyon, et son cœur transporté à La Bénissons-Dieu.

Ainsi que nous l’avons dit, la famille de Nérestang, acquit, de Gasparde de la Roue, veuve du comte Gilles Robert de Lignerac, la baronnie de Saint-Didier.
La famille de Nérestang était une ancienne famille, originaire de l’Auvergne, dont la noblesse remontait au Xe siècle. Cette famille aurait fourni des combattants à l’armée que Simon de Montfort et son fils, ensuite, commandèrent contre les Albigeois de 1208 à 1229.
Au XIIIe siècle, les membres de cette famille avaient la charge de Bailli des Montagnes.
Elle la conserva pendant très longtemps.
Le château de Nérestang était situé dans la Haute-Auvergne commune de Saint-Falgoux, près de Salers, arrondissement de Mauriac. Ce castel fut détruit pendant les guerres de religion. La famille était antique et avait d’authentiques quartiers de noblesse.
Dès le 1er degré, Philippe de Nérestang participa e la lutte avec Simon de Montfort et le comte de Toulouse.
Au 2em degré, Jean de Nérestang fut gouverneur de Lavaur, pour Simon de Montfort, pendant la croisade contre les Albigeois. Il fut écuyer d’armes du roi. Ensuite, Etienne de Nérestang fut également écuyer d’armes, bailli de Haute-Auvergne, de 1297 à 1307. Il épousa demoiselle de Valforges.
Au 4em degré, Etienne II de Nérestang, qui vivait en 1393 et 1398, également bailli de la Haute-Auvergne, épousa Guérine le Frélue, fille de Raymond II, seigneur de Fréluc, près de Drugeac, et de Catherine d’Ornhac.
Guy 1er de Nérestang épousa la vicomtesse de Murat.
Un Jean de Nérestang, capitaine du château de Claviers existait encore à la fin du XVe siècle. En effet, il n’était pas mort en 1497. Il avait épousé, avant 1484, Isabeau de Sartiges.
Une note en forme contient l’extrait, daté du 17 mars 1502, d’un testament du 4 décembre 1501, par lequel Jean de Negro Stagno, damoiseau et capitaine du château de Claviers, institue pour ses héritiers, Pierre et Guy de Negro Stagno, ses neveux, et fonde un annuel de messes dans l’église de Salers.
Il y a tout lieu de croire que la famille fixée plus tard dans le Velay, n’avait pas une origine différente.
Guy II de Nérestang, au 6em degré, épousa demoiselle de Tortolon.

Au 7e degré, Guy III épousa demoiselle de Saillans, et, au 8em degré, Aimé-Antoine de Nérestang épousa demoiselle de Soleilhac.
Antoine de Nérestang fut tué, en 1577, au siège d’Issoire. Leur fils fut Philibert de Nérestang, qui devint baron de Saint-Didier par achat des terres.

La famille de Nérestang se disait issue des comtes de Charlus, avant que celle-ci ne se fondît dans celle de Lévis, par Girard, fils d’Etienne de Charlus, seigneur de Nérestang-Verdelon, bailli de la Haute-Auvergne, qui vivait en 1172.
On trouve pour descendants : Pierre Guyot, Gieido, Amblant aîné et Antoine de Nérestang, marié, en 15…, avec demoiselle de Chanderasse de Nérestang, père et mère de Philibert de Nérestang.
D’autre part, on trouve un Jean de Lom Nérestang, écuyer et châtelain de Jonas, en la paroisse de Sainte-Voye.
Dans un acte passé au château de Monistrol, en 1523, on trouve un noble Jean de Lom, écuyer du seigneur évêque du Puy et son châtelain, dans son château de Bonnes.
Dans la suite de l’acte, il est appelé Jean de Lom Agurglans et, un annotateur a mis en marge, Nérestang. Est-ce le père de Philibert ? Cette famille est-elle originaire du pays ?
Philibert de Nérestang servit utilement quatre rois Charles IX, Henri III, Henri IV et Louis XIII.
Il a laissé dans l’histoire, comme dans la fortune de sa maison, des traces que le temps n’a pas effacées.
Le premier de ces monarques lui donna commission de lever un régiment qui fut licencié au moment de la signature du traité de Verviers, en 1598, traité qui mit fin à la guerre avec l’Espagne.
En 1589, par lettres du roi données à Paris, au mois de février, Autremont ou Entremont, en la paroisse de St-Victor-sur-Loire, fut érigé en fief.
En réalité, la mesure ne fut appliquée que le 15 mai 1600 en faveur de messire Nérestang, gentilhomme ordinaire de la maison du roi et maître de camp d’un régiment de gens de pied.
Pendant les guerres de religion, en 1591, aux mois de mai et de juin, les Dauphinois du Parti protestant, franchirent le Rhône, s’emparèrent de Givors et firent prisonnier le seigneur de Nérestang qui y commandait les Ligueurs.
Peu après, cependant, les royalistes s’étant retirés, le marquis de Nérestang fut libéré et il reprit le commandement de Givors.
En 1592, il se trouvait encore à la tête de cette même place,
Il avait reçu quelques secours. Il repoussa de nouveau les efforts des adversaires qui firent une tentative infructueuse, le 7 février 1592.
Philibert remit ce régiment sur pied en 1600, et il fit, avec lui, deux campagnes. Il le réorganisa une troisième fois pour servir au pays de Juliers.
Le 25 mars 1609, Jean Guillaume, seigneur de Clèves et de Juliers, mourut. L’électeur de Brandebourg, le comte palatin de Neubourg, l’électeur de Saxe, réclamèrent cette succession.
L’héritage en valait la peine. Il formait un ensemble compact de riches territoires catholiques entre la Hollande, les Pays-Bas espagnols et l’électorat de Cologne.
L’empereur d’Allemagne, pour mettre d’accord les prétendants, fit partir pour Juliers un archiduc.
Henri IV voulut empêcher la maison d’Autriche de s’installer ainsi dans les duchés, sur le Rhin. Il négocia même avec les princes protestants d’Allemagne, avec le duc de Savoie. A la veille de sa mort, Henri IV se préparait à la guerre contre l’empire et les Espagnols.
Philibert de Nérestang conserva le commandement de ce régiment jusqu’en 1611, date à laquelle il fut nommé capitaine de la première compagnie des Gardes du corps.
Les soldats de son régiment avaient été recrutés en partie dans le Velay.
Et comme Henri IV avait fait lever vingt-cinq compafinies dans la province, tant pour l’expédition de Clevès, que pour le secours du duc de Savoie, le duc de Ventadour fit passer ces troupes en Dauphiné, après avoir fait payer un prêt de 3.000 livres pour leur subsistance. Ces compagnies ne devaient être que de deux cents hommes chacune, mais Nérestang enrôla 1800 hommes dans le Vivarais et le Velay, ce qui causa beaucoup de dommage à ces deux pays.
En 1604, dit une Histoire de Henri IV, le marquis de Nérestang était allé à Clermont, en revenant de Riom, où l’avait appelé, a-t-il dit, un procès de sa fille.
Mais, en réalité, c’était pour arrêter, par ordre du roi, le comte d’Auvergne, fortement soupçonné de trahison.
Le comte d’Auvergne n’était autre que Charles de Valois, fils naturel de Charles IX, élevé à la cour d’Henri III. Il avait été investi par ce prince du comté de Clermont et d’Auvergne, et était entré de bonne heure dans les complots que la marquise de Verneuil, sa soeur utérine, maîtresse d’Henri IV, tramait en Espagne et qui, renouvelés, conduisirent Biron à l’échafaud.
Pour exécuter cette arrestation, comme Henri IV la voulait, c’est-à-dire, sans effusion de sang et, autant que possible, sans violence, il y fallait certaines qualités d’esprit et de décision.
Henri IV, roi excellent, ne pouvait oublier de semblables services.
Henri IV institua l’Ordre du Mont Carmel, sans doute, dans la pensée de rendre vie, sous une forme nouvelle, à l’ancienne création de Louis de Bourbon, ou de chercher le moyen de récompenser cette noblesse qui ne l’avait jamais abandonné dans les moments les plus critiques de sa vie.
Le 7 septembre 1604, Philibert de Nérestang fut nommé Grand Maître de l’Ordre de Saint-Lazare, à, la mort d’Aimar de Chatte.
Le 4 avril 1608, Philibert de Nérestang fut nommé Grand Maître du Mont Carmel.
La réunion de ces Ordres, le renouvellement de leurs statuts, la confirmation du choix du nouveau Grand Maître, tout cela pouvait être difficile à obtenir de la Cour de Rome. Un voyage de Philibert de Nérestang, en 1607, y fit merveille et il obtint du pape, Paul V, toutes les bulles désirables, qui furent publiées dans l’église de Notre-Dame du Puy, par le Dr Jean Laurens, doyen et official de cette église, l’un des trois commissaires nommés par le pape à cet effet.
Le jeudi 30 octobre 1608, la remise des insignes lui fut faite solennellement, à Fontainebleau, par Henri IV.
Cette qualité a été pendant près d’un siècle héréditaire-dans la famille.
Philibert .de Nérestang obtint la permission de faire cent ‘chevaliers du même ordre.
Le marquis Philibert de Nérestang commença l’acquisition de la baronnie de Saint-Didier, vers 1599. En 1608, et, peu après, en 1609, celle de la seigneurie d’Aurec et d’Oriol, de Marc de Pierrefort, fils de René et de Jeanne de la Roue.

Ce dernier acte eut lieu, le 22 avril 1609, et, dans ce document, Philibert porte déjà le titre de baron de Saint-Didier.
Adrien Lascombo signale une investition portant hommage de la place de Saint-Didier par noble Philibert de Nérestang. Cette investiture porte la date du 20 juillet 1609.
Par ses lettres patentes du 20 juillet 1619, le roi érigea, en faveur de Philibert de Nérestang et de sa postérité, et réunit, sous le nom de marquisat de Nérestang, les baronnies de Saint-Didier et les seigneuries de La Chapelle-en-Velay, d’Aurec et d’Oriol en Forez, Saint-Ferréol, etc…
Le marquis de Nérestang avait acquis également la terre de St-Victor-sur-Loire, où il fit bâtir le château d’Autremont.
Un almanach du Lyonnais dit aussi, qu’en 1618, le marquis de Nérestang, fonda le monastère des Carmes déchaussés de Lyon, à la place d’une ancienne récluserie, qui s’appelait le Grand Therme.
Les armes de cette maison étaient :
D’azur à trois bandes d’or avec la devise : nec nimus, nec minus.
Henri IV permit à Philibert de Nérestang d’ajouter à la bande du milieu, trois étoiles d’argent.
Ces armes étaient donc « d’azur à trois bandes d’or, accompagnées de trois étoiles d’argent rangées entre la première et la deuxième bandes.
Il substitua à l’ancienne devise de sa maison celle-ci Stoelloe manentes in ordine.
Philibert de Nérestang épousa Catherine d’Arènes, dame de Chaponot, près Firminy, fille de Pierre II d’Arènes, seigneur de Chaponot et sire de Jocéas et d’Hélène de Sicard.
Ils eurent cinq enfants :
I. Jean-Claude, né en 1590, qui prit la succession.
II. Françoise, née à Chaponot, le 14 octobre 1591, abbesse de Mégemont, dont son père était bénéficiaire. Elle mourut le 11 mars 1625, à la Bénisson-Dieu.
III. Claude, qui fut successivement prieur de la Bénisson-Dieu, le 8 octobre 1609 ; de Firminy, en 1610 ; de Mégemont ; puis, abbé doyen de l’Ile-Barbe, près de de Lyon. Il mourut en 1613.
IV. Adhémarde (alias Aymarde-Catherine), religieuse avec sa soeur Françoise et coadjutrice en 1619. Elle la remplaça, le 16 mars 1652, mais son administration ne dura que cinq jours, car le chagrin l’emporta, le 21 mars.

V. Antoine, fils naturel de Philibert, qui ne l’oublia pas dans son testament. Il reçut des lettres de dispense pour le vice de sa naissance, le 8 des calendes d’octobre 1613, à l’effet de devenir abbé doyen de l’Ile-Barbe et de succéder à son frère. Il fut reçu le 20 février 1614 avec les protestations ordinaires. Après quatre ans de possession, il résigna son bénéfice à messire de Neuville. Une croix en fer, érigée à Saint-Just, porte le nom d’Antoine de Nérestang.
Philibert eut encore un autre bâtard, mort Chartreux. Il s’appelait Saint Mesmin.
Ajoutons que Françoise de Nérestang fut portée, à l’âge de 6 ans, à l’abbaye de Bonlieu-en-Forez.
Son père, cependant, la destinait au monde, à une grande alliance. Il la conduisit a Paris pour lui faire donner, sous les meilleures maîtres, un complément d’éducation selon le monde, et la jeune fille, quoique regrettant déjà la vie du cloître, acquit bientôt toutes les grâces de son sexe.
Cependant, Philibert de Nérestang, ne pouvant espérer obtenir de la Cour de Rome, pour sa fille cadette, trop jeune alors, des lettres de provision de la dignité d’abbesse de Mégemont, dont le roi lui avait conféré le bénéfice, dut consentir à les accepter pour Françoise qui, heureuse d’être, par les circonstances, favorisée dans sa vocation, rentra, en 1601, au monastère de Bonlieu, où, peu après, elle prit l’habit de religieuse.
A 16 ans, elle reçut du pape ses bulles de provision et de dispense et fit profession entre les mains de l’évêque de Damas, suffrageant de l’archevêque de Lyon et put, en 1603, prendre possession de l’abbaye de Mégemont, dans les hautes montagnes qui avoisinent les Monts-Dores.
Ce monastère avait été fondé en 1322 et approuvé par Charles le Bel.
Nérestang fit réparer le couvent en ruines et, pendant les réparations, il conduisit sa fille et quelques religieuses au Puy. Elles y renouvelèrent leurs vœux à l’église des Carmes et à Notre-Dame, en 1605.
Plus tard, elle vint à la Bénisson-Dieu, abbaye fondée par saint Bernard, en 1138 et par son disciple, Albéric, et longtemps entretenue par la générosité des comtes de Mâcon, du Charollais et du Forez, Guy II, et avec la protection de l’archevêque de Lyon, Foulques, et du roi Louis VII,
En 1140, Hugues d’Ecotay avait donné à cette abbaye divers droits de pâturage et de chauffage, Trois bulles des papes, Innocent II, Adrien IV et Alexandre III, en moins de trente ans, ne furent pas inutiles.
En effet, c’est le 12 septembre 1138, que douze moines de Clairvaux, sous la conduite d’un des leurs, Albéric, fondaient, dans la vallée de la Teyssonne, sur les terres de Fléché et de la Chassagne, concédées par deux seigneurs voisins, Ponce de Pierrefitte et Girin de Bonnefont, une abbaye cistercienne à laquelle ils donnèrent le nom de la Bénédiction de Dieu.
Le troisième enfant du marquis de Nérestang, Claude, fut nommé par le roi, à l’Abbaye de l’Ile-Barbe.
Son règne, ou pour mieux dire, celui de son père, fut un peu turbulent.
Les moines, qui avaient commencé à s’éveiller sous Pierre de Châtillon, son prédécesseur, mort le 5 juin 1609, ne s’endormirent pas à l’arrivée du nouvel abbé. Ils réclamèrent l’application -d’une certaine transaction de 1545 et s’élevèrent contre les statuts de l’ordre. Les moines menèrent grand tapage, Le marquis Philibert de Nérestang accourut incontinent défendre les droits de son fils, qui étaient, d’ailleurs, les siens.
Il répondit aux clameurs des moines en mettant son épée sur la table du chapitre, comme s’il avait voulu dire que ce qui lui avait acquis l’abbaye, lui en conserverait bien les droits, quels qu’ils fussent. Cela voulait dire aussi que ceux qui voudraient les lui disputer seraient châtiés.
Cette bourrasque passa comme un éclair. Les chanoines se contentèrent de braver en paroles, mais le jeune abbé, seulement à l’orient de son âge, fut, peu après, flétri comme une fleur et porté au tombeau, en 1613, pour faire place à son frère.
Le marquis de Nérestang joignait l’esprit à la manière forte
Le baron de Saint-Didier redoutait pour sa fille, qu’il chérissait tendrement, les rigueurs des hivers de la Haute-Auvergne.
Il employa tout son crédit pour faire substituer Mégemont à la Bénisson-Dieu,
Claude de Nérestang, qui était abbé de la Bénisson-Dieu depuis 1609, ne pouvait rétablir la discipline parmi ses moines.
Le 6 mai 1611, le marquis Philibert de Nérestang obtint du pape et du roi la permission de faire permuter Françoise de Nérestang, abbesse de Mégemont, avec Claude.
La translation fut faite en 1611, le 3 juin.

Et c’est ainsi, qu’une abbaye d’hommes fut transformée en un monastère de femmes.
Mais lorsque Françoise, avec ses religieuses, vint prendre possession de la Bénisson-Dieu, le 3 juillet 1612, les bâtiments tombaient en ruines. Il fallut les faire relever, et, dans la reconstruction, on ne put presque rien conserver de l’ancien édifice du XIe siècle.
On y voit encore la chapelle de Nérestang.
Sa soeur cadette, Aymare-Catherine de Nérestang, vint la rejoindre. Elle devint prieure-coadjutrice, en 1619, et, jusqu’au tombeau, qui les réunit dans la même semaine, partagea, avec Françoise, le gouvernement de l’Abbaye.
Françoise II de Nérestang, sa nièce, lui succéda. Elle fut d’abord abbesse de Mégemont, puis, de la Bénisson-Dieu.
Antoine de Nérestang, son frère bâtard, succéda à Claude à la tête de l’Abbaye de l’Ile-Barbe, et aux prieurés d’Aurec, de Firminy et de Saint-Victor.
En 1618, il résigna son abbaye et un vieux grimoire ajoute qu’il prit le nom de Chatellet et qu’il se maria.
L’homme privé diminue quelque peu l’homme public. Catherine d’Arènes, femme du marquis, était aimable, chaste bonne et distinguée.
Philibert de Nérestang se détacha de sa femme par une liaison illégitime. La marquise fut reléguée à Chaponot où elle vivait, seule, de pain et de larmes, et, dans l’état conjugal, comme dans une triste viduité.
Jean-Claude de Nérestang, son fils aîné, élevé à la Cour, mais quelquefois aussi témoin, et, peut-être, confident des chagrins de sa mère, redoutant pour lui-même et pour la fortune de sa maison, l’empire odieux qu’exerçait cette famille étrangère sur l’homme qu’elle s’était asservi, châtia, un jour, emporté par les ardeurs de son âge et de sa nature, la concubine et les bâtards, qui usurpaient le foyer domestique. Après cette scène, il n’eut qu’à fuir pour échapper aux emportements de son père irrité.
Sans asile et sans ressources, il alla se réfugier à la Bénisson-Dieu, et raconta à ses soeurs, dont il était tendrement aimé, les lamentables causes de sa disgrâce.
Le marquis de Nérestang écrivit à Françoise pour lui demander de congédier le fils rebelle.
Françoise était prise entre son devoir filial et la pitié.
Le baron de Saint-Didier, mis hors de sens par cette double désobéissance, poursuivit sa fille, qu’il chérissait particulièrement, du même ressentiment. Il fit saisir les revenus de sa fille, puis, il vint l’arracher du monastère et la fit transporter dans son ch5.teau d’Aurec, où il la retint enfermée pendant quelques mois.
Mais les violences du marquis de Nérestang furent condamnées par un tribunal ecclésiastique. Il s’inclina. Il avait enlevé sa fille à la Bénisson-Dieu, le 1er octobre 1616 ; il la ramena, le 1er février 1618.
Le baron de Saint-Didier était revenu à de meilleurs sentiments ; puisqu’il fit rentrer son fils, qui combattait en Italie, sous les ordres de Lesdiguières et de Montmorency.
Henri IV, en mourant, laissa deux fils de son second mariage avec Marie de Médicis : Louis XIII (1610-1643) qui lui succéda à l’âge de neuf ans, et Gaston d’Orléans.
La mère du jeune monarque se fit attribuer la régence par le Parlement, puis, elle donna toute sa confiance à l’Italien Concini. Ce dernier ne tarda pas à se faire nommer maréchal d’Ancre et à piller, à son profit et au profit des siens, le trésor de guerre amassé à la Bastille par Sully. Impuissant à empêcher le gaspillage, le grand ministre d’Henri IV préféra partir.
Les nobles, dirigés par Condé, demandèrent le renvoi de l’aventurier florentin.
On discuta. On convoqua les Etats-Généraux, en 1614. Les discussions durèrent quatre mois, et les Etats se retirèrent le 24 février 1615, sans avoir rien fait.
Condé saisit le prétexte des discussions entre le Parlement et la Cour pour reprendre les armes. Il réclamait, notamment, le renvoi de Concini et la renonciation aux mariages espagnols. En effet, Louis XIII devait épouser Anne d’Autriche, et, sa soeur, Elisabeth, l’héritier présomptif de la couronne d’Espagne. Philippe IV.
Marie de Médicis acheta, en 1616, à Loudun, une nouvelle fois la paix.
L’évêque de Luçon, Armand du Plessis de Richelieu, qui venait d’entrer au Conseil avec le titre de secrétaire d’État la guerre, fit enfermer Condé à la Bastille.
Peu à peu, Albert de Luynes, cadet de Provence, dresseur de faucons pour la chasse, gagna la confiance du roi. Le favori persuada à Louis XIII que Concini lui faisait courir de grands dangers. Aussi, en 1617, Albert de Luynes, avec le consentement du roi, fit assassiner Concini par le capitaine des gardes, Vitry.
Puis, il devint ministre, et il le resta, de 1617 à 1621.
De Luynes se fit nommer duc, pair, maréchal, connétable. Il n’oublia pas ses parents. Tous ses frères furent créés maréchaux.
Naturellement, le nombre des mécontents augmenta. Le duc d’Epernon, notamment, souleva l’Ouest.
Marie de Médicis, qui avait quitté Blois, où elle était en exil, prit part à la rébellion.
De Luynes promit à la reine-mère, par le traité d’Angoulême, en 1619, le gouvernement de l’Anjou.
Angers devint un centre d’intrigues.
C’est là que se prépara une nouvelle prise d’armes.
Le roi se mit donc en marche sur Angers, à la tête de son armée, mais devancé par des négociateurs qui devaient s’efforcer d’amener la reine-mère à un accommodement.
Le marquis Philibert de Nérestang servait dans l’armée de Louis XIII.
Philibert avait pour aide de camp le fils du premier mariage de Rachel de Cochefillet, qui avait épousé, en deuxièmes noces, le grand Sully.

L’avant-garde de l’armée royale, au moment même où l’on signait la paix, voulut forcer les Ponts de Cée, aux faubourgs de la ville, que défendaient 5000 hommes de troupes de la reine.
Le marquis Philibert de Nérestang reçut dans ce combat, le 7 août 1620, une très grave blessure.
La cavalerie des mécontents, défaite et leurs retranchements pris, les enfants perdus des régiments de Picardie et de Champagne coururent vers la rue qui conduit de l’église paroissiale à l’entrée du pont. Il fallait, pour y pénétrer, enfiler une autre rue étroite qui coupe la première à angle droit et passer sous le feu des ennemis cantonnés dans les maisons et tirant à coup sûr du haut des croisées. Ceux de Picardie s’y lancent des premiers, franchissent tous les obstacles, arrivent aux barricades, les arrachent ou les obstruent et sont suivis d’une foule d’autres, que l’exemple des chefs et l’ardeur de vaincre, précipitent sous leurs pas Nérestang et Bassompierre arrivent avec eux. Le premier, atteint d’une balle, tombe, l’os de la cuisse fracassé, et fut à l’instant même relevé par Bassompierre et par son fils, accouru au cri de son père. Bassompierre, lui-même, n’échappa qu’à la faveur de la foule qui se pressait, à l’un des coups mortels qui venait de frapper Nérestang. Le roi alla voir cet officier dans la maison où les soldats l’avaient transporté et n’omit rien de ce qui pouvait adoucir le sentiment de ses souffrances. Sa première visite fut accompagnée d’un don de 200 pistoles. La chaleur de la saison et la cruelle fracture de l’os qu’on ne put rétablir s’opposèrent à tous les remèdes. Il mourut, le 30 du mois d’août, regretté de la Cour comme de l’armée dans lesquelles il tenait un des premiers rangs. Il existe une relation de cette bataille du Pont de Cée par les troupes commandées par le duc de Royan.
Le traité d’Angers, qui confirma celui d’Angoulême signé en 1619, mit fin rapidement à cette petite guerre civile. Philibert fit son testament, le 20 août 1620.
Ce testament fut collationné par Gidrol, notaire royal à Saint-Didier.
Dans ce document, très défectueux comme orthographe, d’ailleurs, il faisait écrire :
Le jeudy, vingtième jour d’aoust, mil six cent vingt, après midy, In nomine Domini, Amen.

Devant nous, Jullien Angoulvant, notaire royal à Angers, résidant au Pont de Cée, fut présent en sa personne duement estably et soubzmis messire. Philibert de Nérestang, marquis, baron de Saint-Didier, cappitaine de cent hommes d’armes dais ordonnances de Sa Majesté, conseiller en ses conseils d’Estaux (d’Etat), et privé, mareschal de camp en ses armées, chevalier de ses Ordres, Grand maître de l’Ordre de Saint-Lazare et du Mont-Carmel, estant à présent gisant au lict, malade d’une blessure reçue pour le service du roy, près la ville et chasteau de Pont de Cée, le dict sieur estant en la maison de la Chesnay, paroisse de Saint-Hubin, du dict Pont de Cée, lequel seigneur, sain d’esprit, jugement et entendement, a fait présentement son testament et ordonnances de dernière volonté comme s’ensuit. Il recommande, notamment, d’être enterré au couvent des pères Carmes des Chaussées qu’il a ci-devant fondé en N.-D. de Mont-Carmel, à Lion.
Il demandait aussi que sa mère dame Françoise de Chanderasse, présente en sa maison d’Aurecq, païs de Vellay, y soit aussi conduite, le tout avec telle cérémonie qu’il sera advisé par messire Jean de Nérestang, son fils, baron de Saint-Didier et d’Entremont. Il veult et ordonne que son dict fils lui succède universellement.
Et, après avoir révoqué « tous autres testament, codicille et autres dispositions précéddantes lui lègue tous ses biens, meubles et immeubles. Il prescrit, en outre, des restitutions aux héritiers de deffunct le cappitaine de Gagemont, aux héritiers de deffunct Simonard de la ville de Regni, en Beaujollois, pour une rançon payée par ce dernier quand il fut fait prisonnier ; au sieur Vial, de la ville de Saint-Etienne, en Forez. Il n’oublie pas son valet de chambre, Arnault. Il lui lègue 150 livres pour les services du passé que pour supplément de gages et gratifications.
Il lègue à Jean Gailleteau, dict la Roche, la somme de 1500 livres pour les agréables services qu’il a de lui receuz et pour ce que très bien lui a plu et plaist.

Tous ses serviteurs, laquais, pages, gardiens de chiens, amis, chirurgiens, ne sont pas oubliés. Les pères Recollez du couvent de la Baumette, les pauvres de l’Hostel Dieu de Saint-Jean l’Evangéliste d’Angers, ne sont pas oublié, non plus. Il demanda que son cœur reposât dans le monastère de la Baumette.

Son fils est prié d’exécuter e poinct par poinct, selon sa forme et teneur, le présent testament. Faict et passé en la maison du dict lieu de la Chesnay Présens : Maistre René Hamelin, sieur de Richebourg, advocat au siège présidial d’Angers ; maistre Samuel Huten et Pierre Mesnager, prebstre, demeurant en la dicte paroisse de Sainct Aubin, du dict Pont de Cée, tesmoings à ce requis et appelez. Et auquels, sieur testateur avons leu et resleu son dict testament, qu’il a dict bien entendre et ni voulloir, quant à présent, rien adjouster, n’y diminuer dont l’avons jugé comme dessus. Ainsi signez en la minute originalle des présentes :
Nérestang, Mesnager, lutin, René Hamelin, présens, et, nous, notaire soubzigné : Angoulvant, notaire royal. Pour la présente copie et pour avoir cherché la minette, la somme de quarante escus sol.
Le corps du marquis Philibert de Nérestang fut transporté à Lyon et inhumé dans l’église du couvent des Carmes déchaussés, dont il était fondateur.
On a trouvé, jointe à ce testament, une lettre de la marquise de Nérestang, adressée à sieur Pouderoux, à propos. de l’arrière-ban, auquel son mari était convoqué en Forez, comme il l’avait été déjà en Velay, son vrai domicile, et où il avait été reconnu que ses charges et services auprès du roy l’exemptaient de faire partie de cet arrière-ban.
Les fautes d’orthographe abondent dans cette lettre datée de Saint-Didier-en-Velay, le 11 avril 1621. L’écriture est assez libre.
La marquise mourut, à Firminy, le 21 septembre 1634 et son corps fut transporté à la Bénisson-Dieu où Françoise avait fait venir le coeur de son père.

Extrait de l’ouvrage, « D’Azur au Lion d’Argent » Tome II.
Paul Ronin