ANNEXE ET PIÈCES JUSTIFICATIVES

Extrait de l’ouvrage: Etudes sur le régime des manufactures. — condition des ouvriers en soie, par Monsieur Louis Reybaud, membre de l’institut.

C’est encore un gouvernement religieux que nous retrouvons à la Séauve; aucune population n’y était mieux disposée, et l’esprit des fondateurs y inclinait de la manière la plus sincère. Aussi l’autorité des sœurs y a-t-elle été établie saris peine et se maintient-elle sans embarras. Un règlement très sage fixe les droits et les devoirs de chacun, assigne des limites aux attributions, trace des plans de conduite, et par des mesures de prévoyance empêche les empiétements. Une ouvrière admise à la Séauve y trouve plus qu’une famille qu’un atelier, et l’existence qu’elle y mène est assurément plus douce, moins précaire, moins rude surtout que celle du foyer paternel. Aux travaux de la montagne succède un travail dont les heures sont réglées, et qui n’expose ni aux intempéries, ni aux souffrances inséparables de la vie en plein air. La nourriture est également meilleure, les soins du corps sont mieux entendus et plus suivis; l’intelligence est mieux cultivée En somme, la condition est améliorée sensiblement. Pour exciter l’émulation des apprenties, un classement a lieu tous les mois et les gags sont en rapport avec le rang qu’elles obtiennent. Ce gage peut s’élever jusqu’à 5o francs ; il est plus réduit pour les ouvrières moins habiles, et presque nul pour celles qui commencent. La moyenne varie de 140 à 150 francs.. C’est une rémunération plus élevée que celle de Tarare et de Jujurieux, mais il doit y avoir, pour la Séauve, un avantage dans les dépenses alimentaires, à raison de la zone d’approvisionnement, En revanche, d’autres charges y font compensation.

Ce n’est pas sans sacrifices ni efforts que l’an porte la vie dans des pays pauvres, ou les ouvriers d’art sont rares, et où, pour certains services les prix s’aggravent par tes distances et les difficultés d’un déplacement, Dans les débuts surtout, il y a là des conditions onéreuses dont on ne s’affranchit qu’à la longue, et dont on amortit le fardeau qu’après un certain nombre d’exercices.

« Tels sont les trois établissements qui, par leur caractère et leur esprit, méritent de fixer l’attention publique. C’est en deux mots le ressort religieux appliqué à l’industrie. Comme résultats matériels, i1 est difficile d’émettre une appréciation définitive. Deux de ces manufactures, Tarare et la Séauve, sont trop nouvelles pour qu’on puisse établir des calculs sur une base certaine, et, quant à Jujurieux, il semble que ses bénéfices sont plutôt indirects que directs, et consistent moins dans un profit sur l’ouvraison que dans l’avantage d’avoir des soies mieux traitées, plus sûres à l’emploi et d’une qualité plus suivie. Ce qu’on a ainsi dépense:: en préparations se retrouve amplement sur le mérite de t’étoffe.

Voici d’ailleurs un compte dont on peut suivre les détails. D’après des notes que j’ai sous les yeux, les frais de nourriture ne dépassent pas, pour l’un de ces établissements, 40 centimes par tête et par jour ; ils peuvent même descendre plus bas dans les montagnes du la France centrale. En y ajoutant 10 centimes pour l’entretien et les frais généraux, et 16 centimes pour les gages, dont la moyenne est de 60 francs par an, on arrive à un total de 66 centimes par jour et par apprentie, imputables sur 365 journées:, c’est-à-dire 230 fr. 90 c. par an.

Si maintenant on fait porter cette somme sur les 300 jours ouvrables, les seuls qui présentent un produit, on trouve que le salaire quotidien de chaque ouvrière, frais et rétribution compris, roule entre 75 et 80 centimes. Mais ce n’est là évidemment qu’un des éléments de ce calcul, celui de la dépense courante et sujette à se renouveler; il y en a un autre, c’est la dépense fixe, la dépense de premier établissement qui comprend les constructions, l’outillage et les ateliers annexés. Des sommes considérables ont été ainsi engagées; elles vont, pour une de ces manufactures, à un million au moins, qui, amorti à raison de 10 pour 100, représente une charge annuelle de 100,000 francs, supportée par les bénéfices du travail, et à déduire avant tout prélèvement. »

Dans l’ouvrage auquel nous avons emprunté ce que M. Reybaud a bien voulu dire de l’établissement de M. Co1cornbet, se trouve publié in extenso le règlement, actuellement encore en vigueur dans cet établissernent.

Il regarde ce règlement comme étant un modèle à suivre par tous les « établissements du « même genre, soit créé, soit à créer.