Période de succès de la guerre de Cent Ans. — Le Velay encerclé par les Grandes Compagnies. — Du Guesclin en débarrasse la France. — Pierre ter ne resta pas longtemps à la tête de la baronnie. — Ses deux filles Thiburge et Bellonde, héritières.
Charles V, dit le Sage (1364-1380), remplaça sur le trône de France son père, Jean le Bon, mort captif à Londres. Ce prince, prudent et habile, que l’on disait cultivé, s’employa à réparer les maux de la France. Il y avait fort à faire. Indépendamment de sa lutte malheureuse avec l’Angleterre, la France était divisée par les factions, dévastée par les Grandes Compagnies. Il fallut d’abord frapper celles-ci. C’est ce à quoi s’employa Bertrand Du Guesclin, gentilhomme breton.
Du Guesclin battit à Cocherel, le 23 mai 1364, Charles le Mauvais, roi de Navarre, allié des Anglais. Puis, il s’employa à décimer les Grandes Compagnies. Il réussit à en conduire une partie en Espagne pour soutenir Henri de Transtamare, frère de Pierre le Cruel, roi de Castille, également allié des Anglais. Malheureusement, Du Guesclin est d’abord vaincu et fait prisonnier par le prince Noir, à la bataille de Navarette, en 1367.
Deux ans plus tard, il prend sa revanche à Montiel. C’est à cette époque, en 1367, que Pierre 1er, dit Testard, succéda à son père, Jausserand III, à la tête de la baronnie de Saint-Didier. Il n’y arriva que très tard et ne jouit pas très longtemps de sa seigneurie.
En 1339, il hérita de sa grand’mère, Alaïs de Lapte, dame de Lapte, la Mastre et Bozas, qui porta tous ses biens sur son petit-fils, au préjudice des droits de son gendre, Jausserand ; peut-être parce que ce dernier s’était remarié déjà avec Garine de Saint-Romain de Valmordane, sorte d’union que n’approuvent pas toujours les belles-mères.
Pierre était d’un âge convenable, en 1342, pour porter son sobriquet de Testard, et être nommé exécuteur du testament de Jausserand de Glavenas, appelé son cousin, de compagnie avec Alexandre de Saint-Didier.
Ce Jausserand de Glavenas était, sans doute, le seigneur de Lardeyrol, le fils de Poncet de Glavenas et l’époux d’Ales d’Usson qui ne testa, elle, que le 20 mai 1316. Nous ignorons quelle fut la mère de Jausserand de Glavenas ; et c’est par elle, sans doute, que venait sa parenté avec Pierre de Saint-Didier.
En 1343, Pierre de Saint-Didier rendit hommage à Pierre de Chandorat, évêque du Puy.
Nous y trouvons énumérées les vastes possessions que lui avait laissées sa grand’mère, savoir: sa part du château de Lapte, Brossette, Montjevin, le péage de Lapte et du pont de la Sainte, sa part de la leyde et du four de Lapte.
Le Velay connaissait une paix relative.
Pierre de Saint-Didier épousa, en 1340, Philippe Bertrande, nièce du cardinal Bertrand du Colombier, dame de la Bastide d’Andaure.
Le 20 mai 1363, le seigneur de Saint-Didier, en train de deuil, assista au Colombier, près d’Annonay, aux obsèques du cardinal Bertrand du Colombier, son oncle.
On rapporte qu’en 1350, le seigneur de Saint-Didier fut nommé, avec Robert du Guesclin, exécuteur du testament de Jeanne de Malesmains, dame de Sens, épouse dudit Robert, et mère du fameux Du Guesclin.
Mais s’agit-il de Pierre ou de Jausserand de Saint-Didier?
Après la défaite de Poitiers, les Etats du Languedoc s’étaient réunis à Toulouse, au mois d’octobre 1356, et avaient ordonné de lever une capitation pour l’entretien d’un certain nombre de gens de guerre, décision confirmée en mai 1357 par une nouvelle Assemblée des Etats.
Le sire de la Roche protesta auprès du futur Charles V, régent du royaume. En 1357, celui-ci ordonna une enquête.
Une information eut lieu sous la présidence du sénéchal de Beaucaire.
La même année, 1357, le sénéchal interdit aux collecteurs d’inquiéter les réclamants à l’avenir.
Cette exemption fut confirmée par Jean, comte de Poitiers et lieutenant-général en Languedoc, en 1358, à Béziers ; le 6 mai de la même année à Gaillac, et, en 1360, à Toulouse.
Une autre enquête détermina qu’on ne pouvait forcer les sujets des seigneurs de Saint-Didier, de Polignac et autres Vellaves à participer aux impositions royales puisqu’ils étaient taillables à la merci des barons.
Un témoignage prouva, cependant, que les seigneurs de Saint-Didier levaient parfois sur leurs sujets une grande ou une petite taille, de concert avec les gens du roi:
Pendant que les Compagnies occupaient Pont-Saint-Esprit, le connétable de Fiennes convoqua les Etats du Languedoc, qui tinrent une assemblée à Lunel, en 1361 et lui accordèrent un subside pour l’entretien de ses troupes.
La perception de ce subside rencontra beaucoup d’oppositions de la part des nobles. Les receveurs procédèrent à des exécutions contre quelques-uns de ces derniers qui, alléguant leurs privilèges, refusèrent de participer à l’imposition. Ils portèrent plainte au maréchal d’Audrehem qui, en 1363, ordonna au sénéchal de Beaucaire de surseoir aux poursuites pendant deux mois. Le 5 décembre, les poursuites furent reprises. L’affaire dut se terminer par une transaction.
De 1372 à 1375, le duc d’Anjou tenta, une nouvelle fois, de porter atteinte aux nobles du Velay. Mais ces nobles, parmi lesquels le baron de Saint-Didier, en référèrent au roi et le prièrent de mettre fin aux vexations dont ils étaient l’objet. En 1372, Charles V ordonna de faire ouvrir une enquête. Finalement, en octobre 1375, il fut décidé que les sujets « non subsidiables » ne participeraient à aucune imposition. La noblesse fit un don gratuit de 10.000 francs d’or entre les mains du duc d’Anjou.
Pierre eut trois enfants :
I. Alexandre, qui mourut très jeune ;
II. Thiburge, qui hérita de son père la baronnie de Saint-Didier. Elle fut également la seule héritière de sa grand-tante, Guiote de Saint-Didier, fille d’Alexandre 1er, veuve d’Audibert, seigneur de Châteauneuf et de St-Quantin;
III. Bellonde Isabeau, qui mourut jeune, en 1373.
Pierre de Saint-Didier mourut en 1372 (le 21 juin 1373, dit une note).
Dans son acte de dernière volonté, Guiote de Saint-Didier élit sa sépulture au monastère de la Séauve auquel elle donne cinquante florins pour la célébration de quatre anniversaires perpétuels en ladite église de la Séauve, chaque année, l’un à la Conception de Notre-Dame, le second au même jour que son corps sera mis en sépulture, le troisième à la fête de la Purification de Notre-Dame et le quatrième le lendemain de la fête de sainte Marguerite, vierge.
Si son héritière universelle, Thiburge de Saint-Didier, sa petite-nièce, fille de Pierre de Saint-Didier, dit Testard, son neveu, vient à mourir sans enfant, elle lui substitue le monastère de la Séauve.
Elle ordonna, en outre, que son héritière universelle instituât un prébendier pour le service de la chapelle de Saint-Didier, en l’église de la Séauve. Elle dota cette chapelle de cinquante florins.
Extrait de l’ouvrage, « D’Azur au Lion d’Argent » Tome I.
Paul Ronin